20 avril 2015 politis.fr
Silence radio : la folle accélération de la décomposition ukrainienne
par Le Yéti

C’est dans le plus assourdissant des silences médiatiques que la gangrène de la décomposition s’accélère en Ukraine, non dans les nouvelles républiques novorusses ou en Crimée, mais au sein même du pouvoir de Kiev.

Passons sur l’effondrement économique et financier de l’Ukraine. Passons sur cette guerre des oligarques qui permit au président Porochenko d’arraisonner certains de ces concurrents multi-milliardaires (où la démocratie va-t-elle chercher ses élites ?). Que ces requins se bouffent entre eux n’aurait pas plus d’importance si la répression ne ravageait aussi l’ensemble de ce qui constitue la société ukrainienne.

"Suicides" et assassinats en série

Ils appellent ça « lustrer » toutes les instances de pouvoir, du nom du Comité de lustration chargé d’« éradiquer le régime bandit » de Ianoukovitch. Et de fait, ils n’y vont pas avec le dos de la cuiller.

  • Purge dans les milieux politiques avec des "suicides" à répétition de députés ayant appartenu à l’ancien régime. Réaction du pouvoir ukrainien face à ce qui apparaît fort comme des meurtres mal maquillés, sinon pas maquillés du tout [1] : ces disparitions sont « un point très positif » selon Guerachtchenko, député et conseiller du ministre de l’Intérieur.
  • Épuration aussi dans les milieux judiciaires comme ce lynchage d’un juge ayant eu le malheur de déplaire aux militants de Praviy Sektor, traîné dans une poubelle, déshabillé, molesté, contraint de signer sa lettre de démission (NB : la vidéo ci-dessous n’est que la première d’une série de trois visibles ici ; regardez bien le salut sympa qu’y esquisse à plusieurs reprises le milicien à gauche de l’image).

Nazisme et communisme confondus... enfin presque !

À propos de ce nazisme, justement, qui leur colle à la peau, les autorités de Kiev viennent de se distinguer par deux décisions qui resteront dans les annales bien glauques de l’histoire :

  • assimilation des crimes du nazisme et du communisme avec interdiction de toute propagande en leur faveur...
  • ... mais reconnaissance des collaborateurs nazis locaux de l’époque comme « combattants de la liberté » avec avantages substantiels à la clé !

Le centre Simon-Wiesenthal, ONG consacrée à la mémoire de l’Holocauste et à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme, le terrorisme et le génocide, s’en est vivement ému par la voix de son directeur pour l’Europe orientale, Efraim Zuroff :

« Le vote d’une interdiction du nazisme et du communisme consiste à mettre à égalité le régime le plus génocidaire de l’histoire humaine avec le régime qui a libéré Auschwitz et contribué à mettre fin au règne de la terreur du Troisième Reich.

Dans le même esprit, la décision d’honorer les collaborateurs nazis locaux et de les gratifier d’aides spéciales transforme les hommes de main d’Hitler en héros, en dépit de leur participation active et zélée au meurtre de masse de Juifs innocents. »

Les gros godillots de l’Otan dans ce merdier

Pendant ce temps-là, au Canada, pays membre de l’Otan, Valentina Lisitsa, pianiste virtuose ukrainienne, est expulsée sans façon de l’orchestre symphonique de Toronto pour avoir osé critiquer le régime de son pays d’origine. Pendant ce temps-là, 300 parachutistes américains, 200 soldats canadiens, 35 militaires britanniques sont désormais officiellement présents sur le territoire ukrainien.

Pour mettre de l’ordre, servir de forces d’interposition entre les parties, ramener le calme et la raison, faire respecter le cessez-le-feu péniblement négocié à Minsk et dont ils exigent le respect à grands cris ?

Vous n’y pensez pas ! Foin des leçons reçues avec les fiascos afghan, irakien, syrien, les spadassins de l’Otan sont officiellement là pour contrer « l’agression russe » et « former » les troupes en débandade de Kiev dans une guerre qu’ils ont déjà perdue. Au risque du grotesque et de la honte.

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