John
Demjanjuk, 88 ans, qui vit aux Etats-Unis, est soupçonné
d'avoir collaboré à l'assassinat d'au moins 29.000 juifs
en tant que gardien du camp. S'il est extradé, il sera jugé
en Allemagne.
C'était l'un des criminels de guerre nazi les plus recherchés
encore en vie. Trois mois après que la Cour suprême allemande
a autorisé la tenue de son procès en Allemagne, la justice
d'outre-Rhin a délivré mercredi un mandat d'arrêt international
contre John Demjanjuk. Ce vieil homme de 88 ans, ukrainien
de naissance puis ayant acquis la nationalité américaine,
est soupçonné d'avoir été un des gardiens les plus effroyables
du camp d'extermination nazi de Sobibor, en Pologne, lors
de la seconde guerre mondiale. Y ayant travaillé de mars
à septembre 1943, il aurait contribué à l'assassinat de 29.000
déportés juifs, ce qui lui vaut 29.000 chefs d'inculpation
pour complicité de meurtres.
Son transfèrement serait l'aboutissement d'un imbroglio judiciaire commencé il
y a plus de trente ans, en 1977 à Cleveland. John, né
Ivan, Demjanjuk émigre en 1951 aux Etats-Unis dans l'Ohio
pour y travailler comme mécanicien automobile. Mais à
la fin des années 1970, l'ancien nazi est reconnu par
d'anciens déportés comme «Ivan le Terrible», un des pires
bourreaux du camp d'extermination de Treblinka en Pologne.
Alertés, les Etats-Unis le déchoient de sa nationalité
et l'extradent, en 1986, vers Israël, où il est condamné
à mort. Il passera plus de six ans dans le couloir de
la mort israélien avant que dans un premier retournement
de situation, la Cour suprême de l'Etat hébreu ne l'acquitte
en 1993. Des archives du KGB identifient alors un autre
homme, Ivan Marchenko, comme étant «Ivan le Terrible».
La trace de ce dernier a été perdue en Yougoslavie après
la guerre.
Demjanjuk prétend avoir servi dans l'Armée Rouge pendant
la guerre
Demjanjuk, qui a toujours
clamé son innocence et prétend avoir servi dans l'armée
russe et avoir été fait prisonnier par les Allemands
en 1942, retourne donc dans l'Ohio. Sa nationalité américaine
lui est restituée. Mais de nouveaux documents vont bouleverser
à nouveau sa retraite en 2002. Des originaux d'archives
allemandes, tombées aux mains de l'Armée Rouge, prouvent
que Demjanjuk a bel et bien participé à l'assassinat
de prisonniers non dans le camp de Treblinka mais à Sobibor.
Des témoins racontent l'y avoir vu pousser des juifs
à coups de pied et de crosse de fusil, pour les faire
descendre plus rapidement des wagons qui les convoyaient.
Les Etats-Unis lui retirent alors pour une seconde fois
sa nationalité américaine en 2002.
«On espère que ce bourreau
va finalement recevoir la punition qu'il mérite pour
ses crimes. C'est une journée importante pour la justice»,
s'est félicité le chasseur de nazis Efraïm Zuroff, directeur
du Centre Simon Wiesenthal de Jérusalem. Ce mandat d'arrêt
et la comparution prochaine de Demjanjuk devant le tribunal
de Munich est une consolation pour le centre Wiesenthal.
Le mois dernier, les médias allemands ont révélé la mort
en 1992, en toute impunité au Caire, d'Aribert Heim,
coorganisateur de la solution finale et un des anciens
criminels nazis les plus recherchés de ces 40 années.
Le fils de John Demjanjuk
a lui annoncé à l'AP que son père continuerait de contester
les faits qui lui sont reprochés. «Mon père n'a jamais
blessé quiconque avant ou après la guerre. C'est une
personne admirable pour ses enfants et petits enfants.
Dans ce triste dossier, il n'y a aucune preuve concrète
de son implication». «Souffrant d'insuffisance rénale
et d'une maladie du sang, il n'est pas apte à être extradé»,
a ajouté John Demjanjuk Junior.
lefigaro.fr
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