Acteur-clé du procès de l’ancien nazi hongrois présumé Sandor
Kepiro (photo) qui débute ce jeudi, Efraim Zuroff, directeur
du Centre Simon-Wiesenthal de Jérusalem, explique à FRANCE
24 l’importance de cet épisode judiciaire.
Sandor Kepiro, un ancien nazi hongrois présumé, comparaît
depuis ce jeudi devant la justice de son pays. Âgé de 97
ans, cet ancien capitaine de gendarmerie est accusé d’avoir
donné l’ordre de tuer, en 1942, au moins 1 200 civils,
dont des juifs, à Novi Sad (Serbie). À l’ouverture du procès,
qu’il a qualifié de "cirque",
Sandor Kepiro a clamé son innocence. Il encourt la prison
à perpétuité.
Pour Efraim Zuroff, directeur du Centre
Simon-Wiesenthal de Jérusalem, le procès de celui que l’on
présenta pendant des années comme le "nazi encore en vie le plus recherché" est l’aboutissement d’une longue traque.
Sandor Kepiro avait fui la Hongrie
en 1944 après avoir été condamné à dix ans de prison pour
crimes de guerre. Il s’était réfugié en Argentine avant de
profiter de la chute du communisme pour rentrer dans son
pays, en 1996. Dix ans plus tard, Efraim Zuroff retrouve
sa trace à Budapest, où il sera arrêté en 2009. Témoin-clé
de cette affaire, le "chasseur de nazis" explique à FRANCE 24 l’importance de ce procès.
FRANCE 24 : Pour vous qui avez contribué
à l’arrestation de Sandor Kepiro, que représente ce procès
?
Efraim Zuroff - J’éprouve une grande joie. D’autant plus
que, mardi, la justice hongroise m’a acquitté dans un procès
en diffamation que Sandor Kepiro a intenté contre moi l’année
dernière. Cependant, ce procès n’est pas mon histoire mais
celle des Hongrois.
C’est avant tout un moment historique
pour le pays. Il s'agit du premier procès d’un ancien nazi
depuis l’indépendance du pays, en 1946. Il pourrait enfin
permettre à la Hongrie d’exercer un travail de mémoire sur
son rôle joué pendant la Seconde Guerre mondiale.
Et puis ce procès intervient à un
moment où le pays est confronté à une résurgence du discours
populiste qui stigmatise de plus en plus violemment la population
rom. C’est l’occasion de montrer à quel point le racisme
et l’antisémitisme peuvent mener à des horreurs.
Comment les Hongrois accueillent-ils
la tenue de ce procès ?
E. Z. : L’opinion hongroise est clairement divisée. J’ai
rencontré des personnes qui me soutiennent à 100 % et d’autres
qui me critiquent. Reste que j’ai vécu aujourd’hui l’un des
moments les plus forts de ma vie : une manifestation de catholiques
arborant une étoile jaune. C’était très émouvant.
Sandor Kepiro est peu connu du grand
public. Pourquoi figurait-il parmi les "nazis les plus recherchés" par le Centre Simon-Wiesenthal ?
E. Z. : Il était officier en 1942. C’est lui qui donnait
les ordres d’exécution. Sandor Kepiro est, en outre, un homme
extrêmement intelligent qui a réussi à se cacher durant des
décennies. Pour toute l’Europe de l’Est, c’est un symbole
de la collaboration avec le régime nazi.
Comme bien d’autres dignitaires nazis,
il affirme n’avoir fait qu’exécuter des ordres…
E. Z. : Cette ligne de défense a déjà été rejetée à plusieurs
reprises devant les tribunaux. Si on suit cette logique,
seul Adolf Hitler serait responsable ! En outre, Sandor Kepiro
est un juriste de formation, donc il savait parfaitement
que les ordres qu’il a choisi d’exécuter étaient illégaux.
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